À LA VIE, À L’AMOUR, À LA MORT (DE LA VIE)

<p>d'après Paul Claudel, Racine et Eugène Durif,<br />
mise en scène de Guy Alloucherie et Éric Lacascade</p>

Tristan Jeanne-Valès

À LA VIE, À L’AMOUR, À LA MORT (DE LA VIE)

1997
d'après Paul Claudel, Racine et Eugène Durif, mise en scène de Guy Alloucherie et Éric Lacascade

D’abord L’Échange. Dans une première partie, un monde de déracinés au « besoin de consolation impossible à rassasier ».

L’Échange invoque mille images de corps blessés. Touchés par des mots et des corps. Pour Paul Claudel, « les personnages de L’Échange sont les voix intérieures d’un seul et même individu ».

Ainsi reprenant les propos de Claudel, nous allons vers un état particulier des personnages. Où chacun est le prolongement, une tentation de l’autre et naît de tous les corps. Chaque acteur est tous les personnages, et les personnages se partagent l’acteur.

La richesse du texte et des situations imposent une vision et une redéfinition des formes du théâtre. C’est ce que Claudel nous dit et nous force.

Un théâtre qui se cherche, des acteurs en quête, des personnes en revendication d’identité. Prêts à tout, dans la marche du temps. Nous nous sommes acharnés à tout prendre, ouvrir des portes, ouvrir les cœurs et laisser échapper ainsi les mots de Claudel.

Fouiller, creuser et dériver « entre la terre et le ciel. Entre le ciel et la mer ou Louis Laine plonge et trouve une pièce d’or qu’il avale ».

Nous allons du groupe à l’individu, du groupe au couple (ce sont avant tout des histoires d’amour). Chemin de découvertes, d’errance, lieu du bout du monde, chacun se heurtant de façon définitive à ses propres limites. Une lutte en nous perpétuelle. Pour savoir ce qu’on voudrait être, véritablement. Il n’y a pas si loin de la fiction a la réalité. Si on y regarde bien. De près.

Déchirement. Accumulation de malentendus, de confidences, d’impasses mortelles. Désirs insensés, impossibilité d’aimer trop fort. Carnage d’amour. Voilà pour Claudel. En résumé, « préserver l’essentiel avec juste ce qu’il faut de superflu ».

Pour ce qui est de Racine et de ce qui fera la seconde partie de De la vie travail inachevé. Quelle douleur ! Ces personnages qui nous touchent au plus profond de nous-mêmes, et qui, comme nous, ne seront sauvés de rien. Les voilà incarnés, leurs sentiments démesurés, exposés, explosés avec Claudel, ils se rassemblent ici. Points de tensions internes, chez Phèdre, Hippolyte, Ancie, Oenone.
Racine écrit, saisit des paroles dans la rue, prises sur le vif, et les « formalise » (alexandrins).
Il accumule là un matériau de pensées, de réflexions, de doutes. Il est le prolongement de Claudel, de nous, enfermés là où nous sommes avec eux, enfermés volontaires. Au paroxysme de la passion.

De Claudel à Racine, le même soleil, les mêmes brûlures, le même village baigne par la mer.

« II y a des gens qui vont sur la mer avec un petit vent et traversent la mer : ainsi font-ils mais ils ne la traversent pas. La mer n’est pas une surface. Elle est de haut en bas l’abîme. Si tu veux traverser la mer, naufrage. » Eckhart

Quant à Eugène Durif, auteur vivant, présent. Présent aux répétitions, il saisit sur le vif les paroles d’acteurs. Il est au cœur des répétitions, le prolongement de l’instant. Il écrit les instantanés. Il est le témoin privilégié du travail en cours. Son écriture est « dans tout ça » révélatrice de ce qui chaque jour nous bouleverse, nous émeut, nous détruit ou nous fait vivre.

Avec nous dans nos essors, tentatives, reprises, redémarrages, chutes et découvertes. Comme si la trace écrite devenait ainsi nécessité pour livrer cela en plus ou encore au public, pour parler plus, respirer ensemble, chercher encore ici les raisons de ce que nous vivons.

Guy Alloucherie, Éric Lacascade

Tristan Jeanne-Valès

Distribution

MISE EN SCÈNE : Guy Alloucherie, Éric Lacascade /

AVEC : Jérome Bidaux / Lucile Jourdan / Daria Lippi / Thierry Mettetal / Patricia Pekmezian / Arzela Prunennec / Serge Turpin /

DÉCORS, COSTUMES : Claude Chestier /

LUMIÈRE : Thierry Dubief /

MUSIQUE : Laurent Ide /

Dates de tournées

THÉÂTRE D’HÉROUVILLE – CENTRE DRAMATIQUE NATIONAL DE NORMANDIE : JANVIER – FÉVRIER 1997

Documents